En février 1979, la révolution iranienne, marquée par la destitution du chah d’Iran, monarque pro-américain, entraîne immédiatement le gel des relations entre le bloc ouest et l’Iran. L’Ayatollah Khomeiny décide alors de mettre en place une politique autarcique, basée sur la rupture des relations économiques et diplomatiques avec les pays occidentaux. Cette révolution marque alors le point de départ, d’une sorte de « guerre froide » irano-occidentale, s’établissant sur un plan idéologique, politique et économique.
La période antérieure à la Révolution :
Durant les années 1950, l’Iran adopte une position pro-occidentale, par le biais de la politique menée par le Chah Mohammad Reza. Dans une optique de mise en place de partenariats économiques avec le bloc de l’ouest, l’Iran rejoint le pacte de Bagdad signé le 24 février 1955, visant à ralentir l’influence soviétique au Moyen-Orient. En parallèle, des tensions entre l’Iran et l’URSS apparaissent, en 1956, la rencontre entre le chah et Nikita Khrouchtchev est peu chaleureuse. A la fin des années 1950, l’Iran se rapproche alors des Etats-Unis et lance alors un plan de modernisation, d’occidentalisation du pays, correspondant à des plans de développement et aboutissant à la Révolution blanche à partir de 1963. Ces réformes s’établissent sur plan économique et social, mais passe également par un progressisme sociétal. A titre d’exemples, les soins médicaux deviennent gratuits, les profits des industries sont redistribués aux ouvriers d’une manière plus équitable les zones rurales sont intégrées dans un programme d’urbanisation. En parallèle, les femmes voient leurs droits évoluer, en 1975, l’égalité parentale entre mari et femme est promulguée, ainsi que l’instauration d’une égalité entre mari et femme dans le cadre du divorce. Puis, durant la même période, une loi permet l’ouverture et l’essor des films occidentaux en Iran.
La mise en place de la Révolution :
Face à l’élaboration de ces lois, le chah devient impopulaire auprès de la frange conservatrice, attachée aux valeurs traditionnelles de l’Islam. La figure de proue de cette contestation, l’Ayatollah Khomeini, va alors émerger. Religieux respecté, il est exilé d’Iran de 1964 à 1979, et est considéré comme le meneur de la Révolution iranienne. Par ailleurs, cette révolution iranienne n’est pas née instinctivement, celle-ci est liée à différents évènements sur le plan économique, politique, sociétal mais également symbolique. Tout d’abord, les années 1960 sont une période de croissance économique forte pour l’Iran notamment grâce à une hausse de la demande de pétrole. Cependant, cette croissance s’accompagne d’une inflation forte, et cette production de valeur ajoutée n’est pas profitable à tous, et ce, malgré les réformes visant à favorisant les milieux ouvriers et ruraux. Dans ce contexte, où les écarts de conditions de vie entre la population occidentalisée et rurale à tendance conservatrice se creusent, des évènements symboliques ont également constitué des vecteurs remettant en cause la légitimité du chah. A titre d’exemple, pour célébrer le 2500ème anniversaire de l’empire perse, en octobre 1971, des festivités avaient été organisées et dont le coût exorbitant avait été estimé entre 100 et 300 millions de dollars. L’Ayatollah Khomeini estimant que ce festival est un lieu de débauche qualifiera celui-ci de « festival du diable ». Puis, sur le plan politique, l’Iran est contraint de libéraliser son système, sous les pressions du président américain démocrate Jimmy Carter. En échange d’une continuité de livraison d’armes à l’Iran, Jimmy Carter obtient alors la promesse de l’Iran d’assouplir son système politique et à essayer de respecter les droits de l’Homme. En 1977, la liberté d’association est autorisée et des prisonniers politiques sont libérés. Cette indulgence du chah sur le plan politique se révèlera fatal pour ce dernier. En effet, à l’issue de ces évolutions, des contestations naissent et se multiplient dans le pays. En effet, à partir de l’année suivante, les manifestations se révèlent de plus en plus violentes, les policiers n’hésitent pas à tirer à balles réelles sur les manifestants. Les manifestations gagnent alors en intensité, le 12 décembre 1978 deux millions de personnes manifestent à Téhéran.
L’exil du chah et le changement de ton avec l’Occident :
La situation devenant insoutenable, le chah prend la fuite le 16 janvier 1979, il trouve par la suite refuge aux Etats-Unis où il se fait soigner pour son cancer. En parallèle, l’Iran voit son système politique changer radicalement. L’Ayatollah Khomeini, après 15 ans d’exil, est accueilli comme un héros le premier février 1979. Il souligne sa volonté de donner un caractère démocratique à une vie politique, dans un pays où les valeurs de l’Islam ont été oubliées durant le règne du chah. Mais très rapidement, sa politique se durcit sur un plan extérieur comme intérieur. L’ayatollah adopte une position hostile face à l’Occident et plus précisément avec les Etats-Unis. A l’automne 1979, face au refus des Etats-Unis d’extrader le chah en Iran pour qu’il soit condamné à mort, l’Iran entreprend des représailles. Le 4 novembre 1979, l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran est encerclée, entrainant la prise en otages de 53 membres. La rançon est claire : les Etats-Unis extradent le chah et en contrepartie les otages sont libérés sains et saufs. Le président de l’époque, toujours Jimmy Carter, refuse de céder à ce chantage et décide d’entreprendre une opération afin de libérer les otages, cette intervention militaire porte le nom « Eagle Claw ». Cette opération est finalement annulée et se solde par un échec. Finalement, les otages seront libérés le 20 janvier 1981, lors de l’inauguration day, soit l’investiture de Ronald Reagan.
La période actuelle (XXème siècle), entre rapprochements et tensions :
Avec la révolution, l’Iran est alors passé d’un régime pro-occidental à une théocratie isolationniste. En effet, le pays est désormais gouverné sur la base de principes fondamentaux de l’Islam, et les écarts sont sanctionnés par la police des mœurs. En effet, la religion doit être omniprésente dans la vie des Iraniens, et ceux, qui, même par inadvertance désobéissent aux « règles » établies peuvent être pris pour cible. On peut d’ailleurs prendre l’histoire d’une femme,qui, en avril 2018, avait fait le tour des réseaux sociaux. Celle-ci avait été prise à partie par des policiers religieux car des mèches de cheveux dépassaient de son voile, elle avait alors été violemment frappée. Cet excès de zèle de cette police dite morale avait même été dénoncé par le président Hassan Rohani. Ce régime s’affirme donc comme un contre-modèle du régime américain dans lequel les libertés individuelles sont respectées. Ce non-respect de ces libertés, prônés par le camp conservateur est légitimé au nom de la protection contre le modèle américain, considéré comme immoral. Cependant, à partir de 2009, la position d’Hassan Rohani progressiste d’Hassan Rohani, combinée avec la politique conciliante d’Obama, permet un réchauffement des relations avec les Etats-Unis. Les contacts entre les Etats-Unis et l’Iran entrainent un accord sur la question nucléaire. Le 14 juillet 2015, les Accords de Vienne sont signés entre l’Iran, les pays de l’Union Européenne et les pays membres du Conseil Permanent de Sécurité des Nations Unies. En contrepartie d’un arrêt de recherches nucléaires à des fins d’utilisation comme arme de destruction massive de la part de l’Iran, les pays occidentaux s’engagent à lever les sanctions économiques, ce qui, de facto, met fin à l’embargo pétrolier. Hassan Rohani voit alors cet accord comme une potentielle ouverture de son pays pouvant lui apporter à terme des débouchés et par conséquent une prospérité économique. Cependant, à partir de 2017, l’arrivée au pouvoir de Trump et sa politique extérieure agressive jette de l’huile sur le feu dans les relations diplomatiques avec l’Iran. Le 8 mai 2018, le président américain décidant d’appliquer son programme électoral, annonce le retrait des Etats-Unis de l’accord. Cette politique est jugée irresponsable de la part de la communauté internationale. En effet, celle-ci est vecteur de déséquilibre au Moyen-Orient, l’Iran étant considéré comme une puissance majeure dans cette région. Cette annonce marque le début d’une escalade entre les Etats-Unis et l’Iran puisque la fin de cet accord signifie le retour de l’embargo américain et alors celui des difficultés économiques pour l’Iran. A l’issue de ce retrait des Etats-Unis la tension monte alors en crescendo, dont le point culminant est atteint en juin 2019. Le 13 juin 2019, un pétrolier japonais est attaqué dans le détroit d’Ormuz. Cette attaque n’étant pas revendiquée, les Etats-Unis accusent alors l’Iran, ce qui crée des tensions diplomatiques. Les Etats-Unis envoient 1000 soldats à la frontière iranienne à l’issue de cet évènement. Le 20 juin, l’Iran annonce avoir abattu un drone américain, qui aurait pénétré le territoire. Trump aurait alors décidé d’une intervention militaire, mais l’aurait annulée à la dernière minute.
Les relations entre l’Iran et l’Occident ont alors évolué au gré des changements de politiques de part et d’autre. L’Iran est passé d’une position pro-occidentale à une position farouchement anti-occidentale à partir de la révolution islamique. Aujourd’hui, la politique du président réformateur Hassan Rohani est plus conciliante mais est loin d’être pro-occidentale. En effet, les divergences idéologiques sont assez exacerbées : l’Occident, favorable à la démocratie, à la liberté d’expression et aux respects des droits de l’Homme s’oppose à la théocratie iranienne, où critiquer le régime peut vous faire valoir d’être arrêté et emprisonné. Ces tensions entre l’Iran et l’Occident peuvent d’ailleurs être symbolisées par l’incarcération de Roland Marchal et Fariba Abdelkhah, respectivement sociologue et anthropologue, accusés d’espionnage, et de nuire à la sécurité de l’état iranien.